Suite et fin de l'atelier proposé par les Archives du Rhône fin décembre 2015 concernant l’histoire d'un lieu. Après un article expliquant comment faire l’histoire d'un lieu privé tel qu'une maison et celui expliquant comment faire l'histoire d'une commune, nous abordons ici les archives à consulter pour faire l'histoire d'un édifice public. Comme précédemment, la présentation sera articulée en deux parties : les principales séries à consulter accompagnées de quelques exemples tirées des Archives du Rhône, suivies de la liste descriptive des séries que l'on peut consulter pour reconstituer l’histoire d'un édifice public.

Les principaux documents à consulter pour faire l'histoire d'un édifice public

Des documents relatifs aux terrains et biens appartenant à la commune, les travaux sur les bâtiments communaux (église, école, mairie, cimetière, ...), figurent dans la série O. On trouve également dans celle-ci les dons et legs d’œuvres faits à la commune. Pour l'Ancien régime, des dossiers de travaux par catégorie d'édifice sont organisés dans les séries 1 C et 9 C.

Les deux exemples suivants consultés portent sur la Mairie de Lucenay (Rhône).
Le premier document est l'avis administratif (suivi de sa transcription) de l'enquête publique menée en 1863 pour la vente aux enchères de la maison communale de Lucenay servant alors de mairie et d'école.

Avis administratif concernant la vente aux enchères de la maison communale de Lucenay

Avis administratif de 1863 concernant la vente aux enchères de la maison communale de Lucenay.
Cliquer pour zoomer. (Source : AD69, cote Op754)

Avis administratif
Le Maire de la Commune de Lucenay (Rhône)
donne avis à ses administrés
Qu'une enquête des Commodo et Incommodo[1] est ouverte sur le projet
formé par ladite commune de Lucenay de vendre aux enchères et adjudication
publiques les bâtiment, cour, jardin et ses dépendances à elle appartenant.
situés à Lucenay, lieu du Bourg, servant de Mairie et de Maison d'Ecole ;
et qu'à cet effet, le Juge de Paix du canton d'anse, Commissaire
désigné, se trouvera à la mairie de ladite commune de Lucenay le Dimanche
26 du courant de dix heures du matin à trois heures du soir, pour recevoir les
réclamations des intéressés.
Fait en Mairie à Lucenay le 12 juillet 1863.
Le Maire
[signé Coinde Nicolas]
Certificat de publication et d'affiche.
Le Maire de la commune de Lucenay (Rhône)
certifie que l'avis ci-dessus a été publié et affiché
en ladite commune dans lieux habituels, le dimanche
douze juillet, présent mois, et que de plus, il est resté
exposé dans le tableau à ce destiné depuis ledit jour,
douze juillet, jusqu'à ce jour.
En foi de quoi le présent certificat a été délivré
Fait à Lucenay le vingt six juillet 1863.
Le Maire.
[signé Coinde Nicolas]

Trois ans plus tard, le conseil municipal décide d'orner la nouvelle mairie d'une horloge. Les documents ci-dessous suivis de leur transcription portent sur l'acquisition de l'horloge publique, avec le vote du paiement et l'approbation du devis par le Conseil municipal de 1866.

Extrait du registre des délibérations du conseil municipal de Lucenay concernant l'horloge publique 1

Extrait du registre des délibérations du conseil municipal de Lucenay concernant l'horloge publique 2

Extrait du registre des délibérations du conseil municipal de Lucenay en 1866 concernant l'horloge publique : vote du paiement et approbation du devis.
Cliquer pour zoomer. (Source : AD69, cote Op754)

Extrait
du Registre des Délibérations
du Conseil municipal
Le onze février mil huit cent soixante
six le Conseil municipal étant assemblé dans
la salle de la Mairie sous la présidence de M.
le Maire, se sont trouvés présents M.M.
Rivoire (Jean-Marie), Coinde (Nas Vincent), Chambion
(Jean-Marie), Berger Duchamp (Etienne), de Champ
(Jean François Dionys), Rivoire (pierre), Ravet (pierre),
Coinde (pierre), Lassalle (François), Gonnel
(Jean-pierre), Rivoire (Claude Benoit.
Le Conseil municipal, sur la proposition de M.
le Maire,
Considère 1° Qu'une horloge publique placée
à la maison commune sur la façade principale
est d'une utilité incontestable, soit pour les
habitants de la Commune, soit pour les voyageurs
qui passent dans la localité ;
2° Que l'ex-Conseil municipal a voté au
budjet additionnel de 1865 art. [vide] chapitre [vide]
le 7 mai une somme de 1700 francs pour
l’acquisition d'une horloge publique à la
maison commune ;
décide que les 1700 francs alloués au budjet
additionnel de 1865 seront employés pour l'acquisition
de l'horloge dont il s'agit et approuve dans tout
son entier le devis ci-joint présenté par M.
Charvet, horloger de la ville de Lyon.
Ainsi fait et délibéré les jours, mois et an susdits.
Ont signé au Registre tous les membres présents
Pour expédition certifiée conforme
Lucenay le douze février mil huit cent
soixante-six.
Le Maire
Coinde Nicolas

La mairie ornée de cette horloge pour 1 700 francs (près de 4 ans de salaires d'un manœuvre[2] ou douze quintaux de bœufs au marché à bestiaux[3]) changea encore de destination, puisque le bâtiment avec son horloge est désormais le bureau de Poste de la commune.

Le bâtiment avec l'horloge publique 2

L'horloge sur l'ancien bâtiment de la mairie. Source : ©Jean Champier
Cliquer pour zoomer.

On trouvera des informations sur les bâtiments scolaires (construction, travaux) en série 1 T pour la période moderne. Les bâtiments et possessions des établissements d'enseignements de l'Ancien régime sont classés dans la série D.

Les acquisitions, ventes, travaux et compatibilité des immeubles et bâtiments diocésains se trouvent en série 3 V, ceux des bâtiments paroissiaux en série 4 V. La série 5 V comporte quant à elle les éléments relatifs aux fabriques[4], ses biens et revenus.

Liste des séries d'Archives et de leur contenu pour faire l'histoire d'un édifice public
Les séries modernes et contemporaines

Ces séries, leur contenus et leurs cotations, sont relativement homogènes d'un service d'Archives départementales à un autre. On pourra donc assez facilement retrouver les mêmes informations pour le département qui nous intéresse.

Série N : administration et comptabilité départementales

  • Sous-série 4 N : bâtiments publics et mobilier départemental : plans, devis, projets, inventaires du mobiliers, photographies, casernes de gendarmerie, écoles, dépôts de mendicité, asiles et hôpitaux.

Série O : administration communale
Il s'agit de documents concernant les communes mais déposés par d'autres Administrations telles que la Préfecture  : terrains et biens appartenant à la commune, travaux sur bâtiments communaux (église, école, mairie, cimetière, ...).

Série Q : Domaines, enregistrements, hypothèques

  • Sous-série 1 Q et 2 Q : Biens nationaux.
    Confiscation et vente des biens du clergé et des émigrés sous la Révolution.

Série R : Affaires militaires, organismes en temps de guerre
Cette série comporte des documents relatifs aux terrains et bâtiments militaires, travaux.

Série T : Enseignement, affaires culturelles, sports

  • Sous-série 1 T : bâtiments scolaires (construction, travaux).
  • Sous-série 4 T : monuments historiques et commémoratifs.

Série V : Culte

  • Sous-série 3 V : immeubles et bâtiments diocésains : acquisition, vente, travaux, comptabilité.
  • Sous-série 4 V : immeubles et bâtiments paroissiaux : acquisition, vente, travaux, comptabilité.
  • Sous-série 5 V : fabriques, biens et revenus.

Série Y : Etablissements pénitentiaires
On y trouvera des informations sur la construction d'établissements pénitentiaires et leurs travaux.

Les séries anciennes

Le contenu de ces séries est un peu plus hétérogène d'un service d'Archives à l'autre, que les séries de l'époque moderne. On ne retrouvera donc pas forcément les mêmes types de contenu dans le même cadre de classement dans les différentes Archives.

Série B : Cours et juridictions de l'Ancien Régime

  • Sous-série 2 B : comptes des consuls et receveurs mentionnant des travaux sur les bâtiments publics).

Série C : Administrations provinciales de l'Ancien Régime

  • Sous-séries 1 C et 9 C : dossiers de travaux par catégorie d'édifice.

Série D : Instruction publique, sciences et arts

  • Bâtiments et possession des établissements d'enseignements.

Série G : Clergé séculier[5]

  • Sous-série 1 G : visites pastorales (visite de l'Evêché pour voir comment fonctionne la Paroisse), domaines, concessions, rentes, terriers, comptabilité des établissements, travaux, plans, acquisitions de biens.
  • Sous-série 2 G : établissements religieux.

Série H : Clergé régulier

  • Domaines, concessions, rentes, terriers, comptabilité des établissements, travaux, plans, acquisition de biens.

Série L : Fonds de l'époque révolutionnaire

  • Sous-série 1 L : bâtiments publics (travaux).
Séries de toutes périodes

Série HDEPOT : Fonds des hôpitaux déposés
Cette série comporte des documents relatifs aux établissements hospitaliers : construction, aménagements et travaux

Série J : archives privées
Cette série étant composée d'archives déposées par des particuliers, des entreprises et sociétés, des architectes, leur contenu peut être très variable. On pourra trouver des dessins et gravures de bâtiments.

Fonds divers
  • Série PER : Les bulletins municipaux ou les bulletins paroissiaux permettront de voir la commune sous un aspect vivant.

Le site Internet des Archives du Rhône ayant des modules de recherches particulièrement efficaces (par thème ou par cadre de classement), je ne saurais que trop vous conseiller d'y jeter un œil pour en savoir plus. Certains instruments de recherche sont en ligne et permettent de préparer efficacement ses recherches.


[1] Enquête préalable effectuée par l'Administration, avant la prise de certaines décisions (déclaration d'utilité publique en matière d'expropriation, ... (source : Larousse).
[2] Calcul effectué sur la base de 220 jours de travail par an à 10 heures de travail par jour, ratio horaire tiré de l'excellent ouvrage "La valeur des biens, niveau de vie et de fortune de nos ancêtres", Thierry SABOT, Collection Contexte, Ed. Thisa, 2012.
[3] D'après le Moniteur judiciaire de Lyon du 31/12/1864 (source : Archives départementales du Rhône et de la Métropole de Lyon, cote PER943-27).
[4] La fabrique, au sein d'une communauté paroissiale catholique, désigne un ensemble de « décideurs » (clercs et laïcs) nommés pour assurer la responsabilité de la collecte et l'administration des fonds et revenus nécessaires à la construction puis l'entretien des édifices religieux et du mobilier de la paroisse : église(s), chapelle(s), calvaire(s), argenterie, luminaire(s), ornement(s), ... (source : Wikipedia).
[5] Le clergé séculier est le clergé qui vit « dans le "siècle" » (du latin : sæcularis) au milieu des laïcs, par opposition au clergé régulier qui vit « selon une "règle" de vie » (du latin : regularis) d’un ordre, d'une abbaye, d'un couvent, d'un prieuré (source : Wikipedia).

Sources :

Article écrit par Chantal, le 27 janvier 2016

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